20.06.2018

Interview

Behind the Mirror avec Inès Mélia

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Paris la nuit ou Paris le jour ?

La nuit. Je suis DJ, donc la nuit. Mais j’ai une vie assez diurne : je travaille beaucoup sur ma musique, en studio, sur mon ordinateur… Ça, je le fais le jour. Mais clairement, la nuit tout m’inspire : les rues, les gens… Il y a quelque chose de magique la nuit dans Paris.
 

Quel est l’endroit à Paris où vous vous sentez le plus vous-même ?

Chez moi, c’est mon antre, là où j’aime créer. Je suis souvent chez moi : je fais ma peinture au milieu du salon, je vire tous mes meubles et je passe des journées sur le parquet. J’ai aussi des phases de création musicale où je m’enferme. Je suis un peu casanière, complètement aux antipodes de l’image de la “DJ parisienne” qu’on pourrait avoir en tête. J’adore dormir aussi, c’est ma troisième passion. Typiquement, quand je peux choisir l’horaire de mon set, je vais toujours préférer ouvrir la soirée même si c’est moins prestigieux. D’abord, parce que les gens sont plus attentifs, moins nombreux ; le rapport au public est différent. Et surtout parce que comme ça, je peux rentrer me coucher tôt.
 

Vous avez beaucoup de casquettes différentes : vous peignez, posez pour des photos, défilez, mixez, vous faites aussi du design sonore… C’est laquelle, celle qui vous fait dire “OK, je veux faire ça toute ma vie”?

Dans toute une vie, on peut faire plein de choses, on n’est pas obligé de choisir une spécialité. Mais je me vois plus vieillir avec la peinture : je m’imagine déjà, vieille dame dans mon atelier… Mais pas trop derrière des platines ! On ne sait pas de quoi demain est fait, mais une chose est sûre, la peinture m’accompagne depuis que je suis enfant, et ça encore pour longtemps.
 

Vous avez envie de transmettre les mêmes choses par votre peinture et votre musique ?

Ce n’est pas la même démarche : ma peinture, c’est vraiment un moyen de m’exprimer à un moment donné, une fenêtre sur mes émotions. C’est un peu plus tourné vers moi, je peins pour sortir des choses de ma tête, de mes tripes. En musique, on est directement en lien avec le public, c’est plus immédiat. Tu ne peux pas être seule dans ton coin quand tu es là pour faire danser les gens, c’est une vraie symbiose.
 

Avez-vous un rituel avant de monter sur scène pour booster votre confiance en vous ?

Je n’ai pas de rituel particulier. Mais j’ai besoin de me sentir bien dans mes fringues, c’est important. Soit par exemple, dans le cadre d’une soirée très mode, où l’on me prête une tenue de dingue qui va me donner confiance en moi, soit dans un club sombre et que j’ai besoin d’être à l’aise pour danser. Quoi qu’il en soit, c’est la sape qui va catalyser ma confiance.
 

La peinture pour le coup, c’est un art très ritualisé : je pousse mes meubles, je mets mon habit de peintre, j’étends des draps pour protéger le sol, je sors les pinceaux, je les lave, je les fais sécher… C’est un rituel en soi.
 

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En peinture, en make-up ou en déco, est-ce que vous avez le même rapport à la couleur? Qu’est ce qui influence vos choix ?

La couleur, c’est ce qui m’intéresse le plus en peinture ; pour moi, c’est l’essentiel, ce qui donne de la richesse à un tableau. Je pioche mon inspiration partout, dans la rue, dans les films.

Souvent, je bloque sur une tonalité de couleurs et j’en fais toute une série.

Pour le make-up : je fais toujours léger. J’ai appris à me maquiller au fil des années, et j’ai mis pas mal de temps à me trouver. Je suis passée par plusieurs phases : eye-liner, bouche rouge… C’était too much. Maintenant, je vais vraiment vers des choses plus épurées et je tente d’utiliser le moins de produits possible. Un bon mascara, un blush, un rouge et c’est tout.

Dans les deux cas, je suis pour le minimalisme : je travaille des palettes restreintes que j’essaie d’emmener loin.
 

On vous soupçonne d’avoir un rythme de vie assez effréné : DJ sets jusqu’à pas d’heure, voyages… Quels sont vos trucs beauté pour camoufler une nuit agitée ?

Il y a un truc capital à retenir : c’est l’hydratation. Boire beaucoup, s’hydrater la peau à gogo. Dormir aussi. Déconnecter son cerveau un peu, avancer dans sa journée tout en sachant que ce soir, ça ira mieux.
 

Est-ce que vous vous sentez différente quand vous peignez pour vous vs quand vous travaillez pour une commande/une collaboration ? Vous accordez-vous la même liberté ?

C’est au cas par cas. Par exemple, mon amie Clémentine qui a ouvert le café-fleur Peonies m’a demandé de peindre un mur chez elle. C’était un vrai échange, et c’est ça qui m’a plu. Je ne peux pas faire ça avec tout le monde. Je choisis mes projets, car je veux garder une liberté totale. J’ai besoin de garder ça encore un peu pour moi, encore “pur”. Avec la musique, c’est différent, car le plus souvent je travaille avec des morceaux des autres et je compose avec ça, en plus je dois m’adapter à un événement, un public...

Je pense que tout doit communiquer, je ne peins jamais sans musique par exemple. Ce que je peins est minimaliste, mais très rythmé, la série me permet ça. J’écoute un album en boucle pendant toute une série, de la musique classique, de l’électro… Tout est lié. Et si je bloque en musique, je me réfugie toujours dans la peinture. Ca me redonne vraiment un second souffle créatif.